vendredi 6 septembre 2013

Connais-toi toi-même (3). Gurdjieff

Connais-toi toi-même; Source : http://tarotprofile.com/content/know-yourself-and-magical-psychological-tarot-profile-alla-alicja-chrzanowska

"Ayant fixé dans sa pensée la différence entre les fonctions intellectuelles, émotionnelles, et motrices, un homme doit, lorsqu'il s'observe lui-même, rapporter immédiatement ses impressions à la catégorie correspondante.
Chaque centre a sa mémoire propre, ses associations propres et son propre penser. En fait chaque centre comporte trois partie : pensante, émotive et motrice.

En même temps, en observant les centres, nous pourrons constater à côté de leur travail correct leur travail incorrect, c'est-à-dire celui d'un centre à la place d'un autre : les tentatives de sentiment du centre intellectuel, ou ses prétentions au sentiment, les tentatives de pensée du centre émotionnel, les tentatives de pensée et de sentiment du centre moteur.
Chez un homme normal, bien portant, chaque centre fait son propre travail. Chez un homme  non équilibré, la substitution continuelle d'un centre à l'autre est précisément ce que l'on nomme "déséquilibre" ou "névrose".
La pensée ne peut pas comprendre les nuances du sentiment. nous le saisirons parfaitement si nous imaginions un homme raisonnant sur les émotions d'un autre. Comme il n'éprouve rien lui-même, ce qu'éprouve l'autre n'existe pas pour lui. Un homme rassasié ne comprend pas un homme qui a faim. Mais pour celui-ci, sa faim est bien réelle.


L'imagination est une des principales causes du mauvais travail des centres.
En règle générale le centre moteur et le centre émotionnel se servent tous deux du centre intellectuel, toujours prêt à leur céder sa place, et à se mettre à leur disposition, parce que la rêverie correspond à ses propres inclinaisons.
La tendance à rêver est due pour une part à la paresse du centre intellectuel, c'est-à-dire à ses tentatives pour s'épargner tous efforts liés à un travail orienté vers un but défini, et allant dans une direction définie - et pour une autre part à la tendance des centres émotionnels et moteur à se répéter, à garder vivantes ou à reproduire des expériences plaisantes ou déplaisantes, déjà vécues ou "imaginées".
L'observation de l'activité de l'imagination et de la rêverie constitue une partie très importante de l'étude de soi.
Puis l'observation devra porter sur les habitudes en général. Tout homme adulte et un tissu d'habitudes, bien que le plus souvent il ne s'en rende nul compte et puisse même affirmer qu'il n'a aucune habitude.
Les centres sont tous les trois pleins d'habitudes et un homme ne peut jamais se connaître avant d'avoir étudié toutes ses habitudes. Leur observation et leur étude est particulièrement difficile parce que, pour les voir et les "constater", il faut leur échapper, se rendre libre d'elles, ne serait-ce que pour un moment. Aussi longtemps qu'un homme est gouverné par une habitude particulière, il ne peut pas l'observer ; mais dès sa première tentative, si faible soit-elle, de la combattre, il la sent et il la remarque. C'est pourquoi, pour observer et étudier les habitudes, il faut essayer de lutter contre elles.
Par exemple, il peut vouloir étudier ses mouvements.
S'il comprend que sa façon de marcher est faite d'un certain nombre d'habitudes : faire des pas d'une certaine longueur, à une certaine allure, etc. et s'il essaie de les changer, c'est-à-dire de marcher plus ou moins vite, d'allonger plus ou moins le pas, il sera capable de voir en lui-même.

Pour s'observer, un homme doit essayer de ne pas marcher de la façon dont il a l'habitude, de s'asseoir  de manière inaccoutumée, il doit se tenir debout quand il se tient d'ordinaire assis.
Dans le domaine des émotions, il est très utile d'essayer de lutter contre l'habitude de donner une expression immédiate aux émotions désagréables.

S'il suit toutes ces règles en s'observant lui-même, l'homme découvrira une quantité d'aspects très importants de son être. Pour commencer, il constatera avec une indubitable clarté le fait que ses actions, ses pensées, ses sentiments et ses paroles résultent des influences extérieures, et que rien ne vient de lui. Il comprendra et il verra qu'il est en fait un automate agissant sous l'influence de stimuli extérieurs.
Il se convaincra que, s'il reste ce qu'il est et ne fait rien d'extraordinaire, c'est simplement parce qu'il ne produit aucun changement extérieur extraordinaire."

Ouspensky, Fragments d'un enseignement inconnu, 1949, traduit de l'anglais par Philippe Lavastine, Stock, 2003, p.163-169

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